Accéder au contenu principal

Le Couronnement de Poppée (Review d'Opéra)


Une soirée au Grand Théâtre est toujours un ravissement. A ma droite, un ecclésiastique quasi centenaire, tout droit échappé d’un roman de Mauriac, se remémore avec nostalgie les nombreuses représentations des Noces de Figaro auxquelles il a assisté au cours de sa longue vie. Derrière moi, une vieille américaine ravit son auditoire en déclarant avec un délicieux accent que « la vie est trop courte pour boire du mauvais rouge ». Nous sommes bien à Bordeaux.

Le Couronnement de Poppée est le dernier opéra composé par Claudio Monteverdi. Il a connu un long sommeil de 300 ans, avant d’être redécouvert en 1888 et de s’imposer au répertoire. Il est généralement considéré comme l’œuvre où apparaît une innovation majeure et appelée à un grand avenir, l'aria.

Le livret de Francesco Busenello met en scène les amours adultérines de l’empereur Néron et de la courtisane Poppée, sur fond d’intrigues de palais, d’assassinats et de commentaires impertinents des nourrices et valets. D’une grande modernité, délicieusement amoral, il regorge de mots d’esprit et d’aphorismes savoureux. On note aussi que dans un esprit déjà très baroque, une bonne moitié des rôles peuvent être chantés indifféremment par des femmes ou des hommes, d’autres sont travestis (les vieilles servantes par exemple). Othon, chanté par un haute-contre, revêt les habits de la douce Drusilla pour tenter d’assassiner Poppée dans son sommeil.

Le spectacle est une coproduction de l’opéra National de Bordeaux et du Festival de Glyndebourne. C’est une reprise de la mise en scène magique et pétillante d’intelligence du canadien Robert Carsen. A chaque instant, il trouve une idée qui fait mouche, totalement cohérente avec le livret. Dans la légèreté comme dans la gravité, le metteur en scène suggère avec élégance et subtilité, sans jamais appuyer ni insister.

Réduit à une longue basse continue, parfois pimentée de quelques traits de cordes, l’accompagnement instrumental laisse une large place au travail du chef, l’excellent Rinaldo Alessandrini. La distribution est très homogène, jeune et virtuose, à l’exception peut-être de Cencic, peu convaincant et limité sur le plan vocal. On retiendra surtout l’incarnation stupéfiante de Poppée par une Karine Deshayes au sommet de son art, tant au niveau du chant que du jeu de scène.

JEF pour CitéGAY

Commentaires

Posts les plus consultés de ce blog

Jamie Mc Dermott (The irrepressibles) : j'ai voulu faire un album qui parle d'homophobie

Il y a plusieurs semaines, The Irrepressibles donnaient un spectacle-événement à Paris pour présenter ''Nude'', leur nouvel album toujours à paraître ... Jamie McDermott , mystérieux créateur du projet, a reçu CitéGAY la veille du concert, et en a profité pour poser pour le photographe Franck Glénisson à l'occasion d'un portrait exclusif pour CiteGAY ... Tombé sous le charme de ''The Irrepressibles'' depuis qu'ils me sont apparus comme dans un mirage en Novembre 2009 au Festival des Inrocks, je n'ai eu de cesse d'écouter leur album ''Mirror Mirror'', mélange inédit de classique baroque et de musique pop. Surpris par les costumes, le maquillage, la conception des spectacles, la sensibilité à fleur de peau, le côté ambigü et androgyne, l'expressivité, je m'étais vite senti face à des dignes héritiers de Kate Bush ou David Bowie (le clip de "Ashes to Ashes" en particulier) avec un je-ne-sais-quoi d...

Take That déçoivent avec leur nouvel album

"This Life" , le nouvel album de Take That, avait déjà sa place réservée dans mes Tops 2023 avant même sa sortie officielle vendredi dernier, mais force est de constater que cet effort est en-dessous de mes attentes. Hormis les deux pépites "Windows" et "Brand New Sun", qui m'avaient enchanté dès leur mise en ligne, la galette manque cruellement de titres enjoués et dansants, voire même rock, et le résultat est loin d'être aussi éclectique que sur l'album "Progress" par exemple. "We Got all Day" en particulier m'a laissée perplexe, car aucune voix n'en ressort clairement. Elle paraît complètement dénuée d'identité tellement elle a l'air d'avoir été enregistrée par une chorale impersonnelle...  En définitive, cette nouvelle galette, même si elle est évidemment de qualité, est juste un peu trop calme à mon goût et laisse une impression de monotonie résolument folk, moins addictive que par le passé.  Un albu...

More Joy ! Le nouveau single "manga style" de Duran Duran

On n'en peut plus de compter les jours qui nous séparent de la sortie de "Future Past", le 15ème album de Duran Duran .  Attendu pour le 22 Octobre 2021, celui-ci est annoncé comme explosif, avec aux manettes de la production le dj Erol Alkan , Giorgio Moroder et Mark Ronson ... Avec "More Joy", le groupe nous dévoile ici un morceau qui s'inscrit dans la lignée de ses plus grands succès, entre "My Own Way", "Sound of Thunder", "Electric Barbarella", ou le plus confidentiel mais non moins punchy "Too Bad You're So Beautiful". La chanson est née d'une session de jam déjanté entre le groupe, Graham Coxon , le guitariste de Blur qui fait partie intégrante du projet et le producteur Erol Alkan . "C'était un morceau tellement inhabituel que nous n'étions pas sûrs de l'intégrer à l'album..." a déclaré Nick Rhodes . "Il m'a rappelé un de ces jeux vidéo japonais rétro, que j'ai t...